Cela faisait un petit moment que Hei était devenu le mahō d'Hikari. Il avait du mal à prendre des initiatives, toujours cloîtré dans sa chambre, n'osant pas nécéssairement bouger s'il n'en a pas l'autorisation ; difficile de changer 140 ans de vie en claquant des doigts après tout. Hikari l'amène partout et ça permet au jeune homme de rencontrer du monde, même si la majorité est inquiète à l'idée d'avoir à faire avec le mahō le plus redouté de Kage no machi, ou du moins l'un d'entre eux. Il était terrifiant pour beaucoup, parce qu'il n'avait jamais fait preuve de "clémence". Il exécutait froidement tous ceux qu'on lui demandait de tuer, sans arrières-pensées aucunes. Pour ça, il méritait le titre de monstre. Bon nombre de rumeurs allait à son sujet ; comme par exemple, qu'il ait en fait tué sa propre majō. Il se dit aussi qu'il a ensorcelé Hikari pour qu'elle fasse de lui son mahō et ainsi que le jeune homme puisse continuer à voir des jours heureux. Tout ça parce que ça s'était fait savoir qu'il avait sa propre chambre dans la demeure de la Tanaka, et pas les autres ushinawareta tamashī. La réalité était loin de celle-ci, pourtant, même s'il était vrai que la jeune femme s'était prise d'affection pour le monstre qu'il représentait. Hei n'y avait rien fait. Il avait même tenté de lui échappé alors qu'elle l'avait forcé à signer un contrat avec elle. Et Hikari lui avait donné de la liberté, plus de liberté que n'importe qui d'autres aurait bien voulu lui donner. Elle le laissait se tenir à ses côtés, lui faisait confiance comme si c'était elle-même qui l'avait façonnée de cette manière. Il n'en était rien, encore une fois. Il lui faisait peur parfois, à elle aussi, mais il n'avait jamais fait exprès, n'avait jamais eu ce but. Quelqu'un d'autres semblait ne pas avoir peur de lui : Kohaku. C'était un petit vendeur de ravioli. Hei le regardait souvent faire, un peu curieux. Beaucoup même. Hei avait le regard d'un enfant qui découvrait le monde, pourtant, les gens lambdas ne voyaient pas cela. Hei restait un moment à le regarder pendant qu'Hikari faisait des courses dans le coin, pour une chose ou une autre. A force de le regarder, cela avait amené une discution, puis une autre. Hei était hésitant au début, il ne savait pas s'il avait le droit de parler avec les autres ; Tomori ne lui avait jamais donné l'autorisation de parler aux autres si elle ne le lui autorisait pas explicitement. La seule chose qu'il avait le droit de dire, c'était qu'il n'avait pas le droit de leur parler, après quoi, il ne répondait plus. Et là... il ne savait pas si c'était la même chose avec Hikari. Jusqu'à qu'il se fasse enguirlander parce qu'il ne répondait pas aux autres. Quoiqu'il en soit, Hei était très réservé avec les autres ; il avait peur de mal faire, quelque part, mais Kohaku avait toujours été gentil avec lui, non pas sans accrochage maladroit entre les deux. Il l'était le mahō après tout.
Mais le yōkai ne s'était pas démonté et avait proposé à Hei de venir chez lui pour qu'il lui apprenne à faire des raviolis. Il avait demandé à la sorcière avant d'accepter. Puis ils avaient convenu d'un jour et d'une horaire qui leur convenait à tous les deux ; enfin, qui arrangeait surtout Hikari. Et puis le jour j, le jeune homme s'était présenté auprès du yokai, toujours vêtu de noir ; c'était la tradition chez lui.
kamikakushi
Invité
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—Jeu 25 Mar 2021, 22:38
“In the darkness, two shadows, reaching through the hopeless, heavy dusk. Their hands meet, and light spills in a flood like a hundred golden urns pouring out of the sun.”
Certaines rencontres sont surprenantes. Elles étonnent dans leur complexité, leurs contrastes d’infinité, leur spontanéité. Kohaku, serpent installé depuis une courte décennie dans la ville-fantôme pourtant pleine de vie, l’avoue à demi-mot : ses quelques relations sont insatisfaisantes, illusions chimériques d’un bonheur qu’il n’atteint pas, paumes pourtant tendues vers le ciel brillant de nuages, attente d’un miracle qui jamais ne se pose en leur creux attentif. Le visage tourné vers les mêmes desseins, amours charnelles qui nuit après nuit le laissent béat, plongé dans les vapeurs d’un enchantement de courte durée. Les sentiments tendres d’une affection sincère et réciproque ont du mal à le frapper ; et puis, qui tomberait amoureux d’un amant perfide ? Soupirs cajolent ses espérances vaines, son compagnon d’un soir est déjà parti, les draps laissés froids par son absence. Le reverra-t-il ? Il en doute, peut-être une seconde fois. Et ça sera fini. Les prunelles qui ne se croiseront plus, s’éviteront dans les ruelles de Kage no Machi. Adorable reptile aux sourires d’ange auquel personne ne s’attache ; ça fait si mal ! Il devrait en faire de même, pauvre idiot au cœur d’artichaut. Se lancer corps et âme dans un jeu dont il sera le vainqueur ; blesser pour éviter d’être détruit.
Lit abandonné, fraîcheur parcourt son épiderme gelé, souffle fatigué alors qu’il traîne les pieds pour se laver, nettoyer les preuves de ses activités nocturnes dont il n’a pas vraiment honte, constater dans le miroir que la peau a rougi. Sourire léger flotte sur ses lèvres, le vêtement maintenant le couvre, et il s’occuper soigneusement de sa chevelure brune. Pourquoi ne pas la teindre, à l’occasion ? Il existe tant de jolies couleurs ! Un beau blond lui irait parfaitement, et que penser d’un bleu, d’un roux ? Il ne sait pas, Kohaku le coquet, il est indécis. Parfum glissé au creux de la gorge, des coudes, baume à lèvres rosé appliqué d’un geste sûr, pommettes corallines, il est pieds nus dans son petit appartement, range ce qui doit être rangé, nettoie les vitres où les insectes se sont parfois égarés ; lent, méticuleux, les ongles grattent la crasse accumulées, ça et là, il n’a pas toujours le temps d’astiquer les recoins de son repaire, homme trop occupé dans des bras inconnus, danseur émérite, superbe acteur ou vendeur de délices salés. Il ne passe jamais plus de quelques heures au sein de son minuscule chez-lui, éternel voyageur, beau parleur. Pourtant, aujourd’hui, une rencontre dénote des autres ; fraîche, pleine de vie, d’enthousiasme sous les yeux doux du vieux yōkai, avide de changement, de nouvelles aventures, plus vraies et sincères. Un garçon charmant le rejoindra prochainement pour un cours de cuisine. Voilà qui est original ! Les compliments pleuvent sur ses compétences de cuistot, mais rares sont ceux qui s’intéressent à la réalisation effectives d’une nourriture variée, maison et préparée avec amour, tendresse. Ravi est Kohaku lorsque, une poignée de minutes plus tard, son invité se présente à sa porte. L’acteur serpente entre les meubles mal agencés, il ouvre, sourire immense planant sur les lèvres sanguines, crocs à peine dégagés, vieille habitude qu’il peine à perdre, vilain lézard.
– Oh, Hei, bonjour ! Pile à l’heure ! Sois le bienvenu dans mon humble demeure, j’espère que tu t’y plairas. Mets-toi où tu peux, c’est légèrement encombré, mais on va faire de notre mieux, d’accord ?
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