● 影の街に住む魂の信じられないほどの物 語 ●



Enfant qui n'aurait pas dû naître, arrivé par accident. Pourtant, rien n'est jamais un accident, n'est-ce pas ? Alors que maman tente de l'élever, papa se contente d'empiler les cadavres de bières. Les maux se répandent à l'instar des traînées de poussière qui s'accumulent entre les membres de la maison. Troisième enfant de la fratrie, Anan, et c'est bien trop. Les grands-frères quittent le foyer et laissent le dernier sur la touche, du haut de ses cinq ans. Et Anan ne comprend rien à tout ça, mais il entend bien les cris qui ne sont pas les siens.
A l'école, cela commence à se voir, à s'entendre, les douleurs du garçon. D'enfant calme, il devient provoquant, turbulent, insolent. Il veut se protéger, Anan, sauf quand les professeurs s'intéressent trop à lui. Je n'ai rien à vous dire. Entendez ma détresse. Et puis, enfin, à l'adolescence les doigts s'éparpillent dans l'encre noire, les maux se tissent et les dessins s'animent. Une certaine libération, bien que sombre, emplie des plus noirs desseins de son âme, de celle de papa, qui lui permet de tenir bon ; rien qu'un peu plus.
Puis, très rapidement, le jeune homme enchaîne les petits boulots, enchaînent les nuits sans levés du jour pour ne jamais rentrer à la maison. Les économies sont cachées, gardées avec secret dans l'urne de mamie, là pourtant, juste sous les yeux de tout le monde. Les murs de la ville se tapissent de son art et Anan se fait remarquer à la sortie de son diplôme de lycée.
Enfin, il brille, Anan. De ses pinceaux naissent des œuvres grotesques, informes et incroyables. Un artiste naît et sa majorité lui offre l'envol au cœur de la capitale. Les rencontres diverses s'enchaînent et l'enfant ouvre vraiment ses yeux pour la première fois sur un monde qui se pare de plus en plus de si belles couleurs.
Quand sa relation se termine, que ses doigts redeviennent une œuvre couleur ébène, il s'élève encore plus haut. Sa violence se répand à travers ses pinceaux. Gamin, t'es appelé à irradier là-bas, au Japon. Et Anan acquiesce sans un mot. A quoi bon s'éterniser sur des terres inhospitalières ?


Maison pauvre, maman trime, papa boit. Et la main se lève, violente, insensible aux larmes qui perlent sur les joues rosées de l'enfant. Tu me fais perdre mon temps. Mais quel temps ? Celui que tu passes affalé dans le fauteuil devant la télé ?
Parce qu'un jour, les mots et les coups ne suffisent plus. Jeune adolescent, les mains de papa deviennent plus douces, plus insistantes. Et s'il est sage, Anan, maman n'en saura rien. Après tout, elle n'a pas besoin de le savoir, n'est-ce pas ? Son cœur s'étreint quand ses lèvres tremblent. Acculé, souillé, les images ne s'en iront jamais à l'instar de toutes ces cicatrices.
Gamin, t'as du talent. Cela lui résonne à l'esprit, une voix posée et agréable mais la silhouette qui se distingue dans l'ombre est floue. Anan a été tiré de sa douleur grâce à cet inconnu, grâce à son talent repéré. Maman, je suis désolé. Mais elle a toujours su, maman, et elle n'a jamais rien fait. Peut-il seulement lui en vouloir de s'être protégée ?
Je n'ai jamais prêté attention à la couleur des fleurs de cerisiers. Ses lippes s'étirent en un sourire délicat tandis que ses doigts se glissent dans ceux de la personne à côté de lui. Un sentiment de chaleur l'enivre et il a l'impression d'avoir enfin trouvé son univers, Anan. Pourtant, en tenant cette main avec allégresse, il finit par se perdre et par la perdre.
Artiste admiré pour son grain de folie, craint par son apparence presque surnaturelle, il sent quelque chose vraiment bouger à l'intérieur de lui. Parce qu'il a toujours su, Anan, qu'il n'est pas comme les autres. Mon fils, il y a un homme qu'il te faut rencontrer. Et maman aussi, l'a toujours su.


Il a longtemps couru, Anan, avant de s'effondrer sur le pas de la porte d'une cabane isolée, au beau milieu de la forêt. Quand il s'est réveillé, le monde a changé tout autour de lui et cette main si chaude posée sur sa joue des années plus tôt n'a plus été qu'un bref souvenir. Qu'est-ce que t'as fait, sombre idiot ? Une question dont il est incapable de répondre, ses prunelles sombres figées sur le masque grossier affublé sur le visage de l'homme en face de lui. Il est secoué, Anan et son crâne ricoche si fort contre son âme.
Il ne comprend pas tout de suite que son histoire commence ici. Ce n'est qu'après s'en être déchiré les cordes vocales qu'il s'est tu, durant plusieurs longues années, Anan, avant de parler de nouveau. Et durant ce temps, ses ailes, aussi noires que les tableaux de ses souvenirs, se sont déployées autour de son corps. Protection ou malédiction ? Apprends à t'en servir correctement et tu seras invincible. Oui, il l'a toujours su, Anan, qu'il n'est pas comme les autres humains.
L'homme qu'il appelle désormais maître se charge de faire de lui une créature puissante. Les ennemis sont nombreux, les tengus sont peu réputés pour être appréciés. Pourtant, ils ne font que protéger les êtres humains et les autres esprits... quoiqu'en s'amusant parfois de façon tout aussi peu subtile que leurs visages d'emprunt. Ankoku se bat de toutes ses forces, comme s'il sent au fond de lui qu'il doit prendre sa revanche sur tout le reste. Lentement, les souvenirs s'entassent dans un coin de la mémoire, preuves d'une existence passée.
Et les voyages s'enchaînent, la découverte de Kage no Machi enhardit l'âme de l'enfant tengu au bec d'oiseau. Les doigts glissent sur son masque, quand son éventail cogne doucement contre sa cuisse, tintant contre le sabre ajusté à sa ceinture. Année après année, Ankoku et son maître se faufilent dans les rues de la ville, profitant de leurs plaisirs ou bien offrant leurs services. Jusqu'à ce soir-là où son maître n'est jamais réapparu.

Bats-toi, fiston. Ne laisse jamais personne te prendre ton âme. Le sourire s'étend derrière l'éventail brandit qui reçoit l'éclat vermeil de la carcasse qui s'abat. La lame essuyée contre le corps sans vie, Ankoku replie ses ailes en tenant sa tête, prête à exploser. d é s o l a n t e détresse.


En tant qu'Ankoku, le tengu possède un masque construit pour la forme de son visage avec différents matériaux : du métal dans sa globalité, peint avec du rouge, yeux colorés d'un jaune perçant, et deux ficelles rouges permet à Ankoku de nouer son visage d'emprunt à l'arrière de son crâne. Son arme de prédilection est un éventail qu'il a lui-même peint avec finesse, tout comme son masque, ceint sur son côté gauche. De l'autre côté, son katana au fourreau noir est étendu contre sa cuisse, chaleureuse arme meurtrière. Dans son dos, lorsqu'elles se déploient, majestueuses, ses deux grandes ailes ébènes s'étirent en lui offrant la particularité suprême de l'oiseau. Certains reflets rougeoyants se glissent parmi les plumes sombres. Enfin, sa tenue est traditionnelle. Il s'agit hakama rouge et noir, et ses pieds sont chaussés de geta en bois quand les serres de sa transformation ne sont pas encore apparues.


Anan mesure un mètre soixante-treize pour une cinquantaine de kilos. Il est néanmoins plutôt musclé grâce à ses entraînements. Anan apprécie particulièrement l'art. C'est lui qui a peint son éventail de combat, possédant de brefs flashs de son passé. Sensible au sort des enfants abandonnés, perdus, maltraités, il s'entend même d'ailleurs particulièrement bien avec eux. Anan est parfois en proie à de violents maux de tête et à des cauchemars récurrents qui le font délirer sous l'effet de l'hyperthermie. Adepte d'adrénaline, Anan est du genre à beaucoup bouger, aimant le sport, et les aventures dangereuses ne l'effraient pas. Il apprécie cependant se retrouver dans la forêt, ou bien dans les temples, se cachant de la vue des autres, afin de se ressourcer - bien souvent, perché sur les toits. Il est friand de viande en règle générale et goûte à tout, mélangeant sans retenu. Anan fume et boit occasionnellement ; mais ne tient pas l'alcool. Il devient alors très affectif. Anan a fait une tentative de suicide dans son adolescence qui lui a valu un mois de convalescence en hôpital psychiatrique. Le mal à l'âme de ne pas savoir qui il a été, qui il est réellement. La folie guette, sournoise, l'enfant perdu, raccroché aux branches.